Découvrez l’univers créatif de Lou Morens, autaire multimédia spécialisé en science-fiction LGBTQIAP+. Avec des années d’expérience à son actif, Lou dévoile les étapes de la transformation de ses écrits en médias visuels, vous guidant à travers le processus de scénarisation, le choix des éléments à conserver, la création de storyboards et la réalisation finale.
Qui est Lou Morens
Tout d’abord, qui suis-je pour me permettre de vous donner des conseils ? Je m’appelle Lou Morens, autaire multimédia, spécialisé dans la science-fiction LGBTQIAP+.
Depuis plusieurs années, je transforme mes écrits en nouvelles visuelles, nouvelles interactives, et dans certains cas, en films d’animation 3D. Je réalise l’intégralité du processus en solitaire, à l’exception de la musique pour laquelle je fais appel à un compositeur.
Mon expérience en informatique m’a été d’une grande aide pour la création de jeux et de nouvelles visuelles interactives. De plus, en tant que graphiste 3D, j’ai pu contribuer à enrichir visuellement mes créations.
Pour donner un aperçu de mon parcours, j’ai commencé par concevoir un petit jeu permettant aux joueurs de découvrir mon univers. Ce jeu a été élaboré à partir des pages d’un wiki que j’avais précédemment mis en place.
Créer un système de jeu, gérer les différentes entrées de chaque « cours », et autres aspects techniques ont été les premières étapes. Cette démarche était relativement simple, car il s’agissait principalement de mettre en avant le contenu sans raconter une histoire.
Ensuite, j’ai élargi mon champ d’expérimentation en intégrant deux courtes nouvelles dans ce jeu. Cela a nécessité de scénariser ces nouvelles en les adaptant au format interactif. Parallèlement, j’ai entrepris la réalisation d’un film d’animation intitulé « Le Noël de Jack« , basé sur une nouvelle centrée sur l’un de mes personnages principaux.
Mon objectif était de le sortir pour la période de Noël, alors j’ai eu deux défis à relever : créer un calendrier de l’Avent avec une petite scène à découvrir chaque jour et produire le film complet en incorporant des scènes additionnelles par rapport au calendrier. En parallèle, j’ai également travaillé sur une nouvelle visuelle dérivée d’une nouvelle plus longue. Cette tâche a nécessité non seulement de scénariser la nouvelle existante, mais aussi d’ajouter des mécanismes de jeu pour rendre la narration plus captivante.
Le processus de scénarisation
Le choix des éléments
La première étape du processus de scénarisation consiste à décider de ce que l’on souhaite conserver ou non lors de la transformation en film ou en jeu. La narration diffère considérablement entre une nouvelle écrite et un média visuel.
Par exemple, les descriptions des lieux ne sont plus rédigées, mais transmises par l’illustration. De même, certaines scènes d’action ne sont plus explicitement décrites, mais sont représentées par la succession d’images, permettant ainsi au spectateur ou au joueur de comprendre ce qui se déroule. De plus, il est crucial de garder à l’esprit que, si des éléments importants de l’histoire sont liés à l’environnement, il faut les présenter d’une manière alternative pour les personnes malvoyantes ou non voyantes.
Une autre décision cruciale est de choisir le point de vue narratif, qui peut différer de celui de l’histoire initiale. Devrait-on opter pour une narration à la première personne ou à la troisième personne ? Comment devons-nous présenter les informations dans le film ou le jeu ? Parfois, il y a des moments où un personnage effectue une longue introspection. Il est alors nécessaire de déterminer si cela doit être inclus dans le média visuel et, le cas échéant, comment le faire de manière efficace.
La création de storyboards et la recherche d’illustrations
La scénarisation est un processus complexe qui permet de préserver l’essence de l’histoire, tout en ajoutant parfois des informations qui n’étaient pas présentes dans l’histoire initiale. Il comprend non seulement la phase de scénarisation proprement dite, mais aussi la création de storyboards pour chaque scène.
La recherche d’illustrations et de séquences filmées est également essentielle. Même si tout est réalisé en 3D, sans acteurs, il est nécessaire de créer des environnements et des actions qui correspondent au scénario et reflètent l’essence de l’histoire. Cela implique des essais et la sélection des éléments qui fonctionnent le mieux, car le créateur devient également le réalisateur dans ce processus.
Pour illustrer cela, prenons l’exemple du film « Le Noël de Jack ». À l’origine, l’histoire était racontée à la première personne, suivant les péripéties de Jack. Certaines informations étaient transmises dans la narration lorsque Jack découvrait quelque chose.
Cependant, pour le film, il était nécessaire de trouver d’autres moyens de transmettre ces informations, car je ne pouvais ou ne voulais pas conserver ce format. J’ai opté pour l’ajout de dialogues pour présenter les informations de manière différente. De plus, ccertaines informations ont dû être omises en raison de mes limitations techniques.
En ce qui concerne la nouvelle visuelle « Double meurtre », l’histoire originale était narrée du point de vue des deux personnages principaux. Cependant, cela ne pouvait pas être directement traduit dans le format de la nouvelle visuelle.
J’ai donc scénarisé l’histoire du point de vue d’un seul personnage, en ajoutant ses réflexions sur les réactions de l’autre personnage. De plus, pour enrichir l’expérience, j’ai créé deux modes de lecture : l’histoire simple et l’histoire avec les points de vue des personnages âgés racontant leurs aventures à leur descendance. Cela a entraîné l’ajout de questions posées par les personnages plus jeunes et de nouvelles informations fournies par les personnages âgés.
En fonction du mode de narration choisi, les réflexions du personnage principal varient. Dans cette nouvelle, deux scènes étaient particulièrement délicates, car le personnage que nous suivons depuis le début n’y était pas présent. Dans la nouvelle originale, cela ne posait aucun problème, car à ce moment-là, l’histoire se concentrait sur l’autre personnage.
Le défi de la scénarisation dans ce type de situation consistait à faciliter la transition d’un protagoniste à l’autre de manière fluide, sans perturber le lecteur. Des transitions ont donc été ajoutées, ce qui n’était pas le cas dans l’histoire initiale.
En ce qui concerne la nouvelle visuelle, les images jouent un rôle prépondérant pour définir l’atmosphère de chaque scène. Cependant, la plupart des informations sont transmises par les protagonistes, que ce soit à travers un narrateur externe ou les pensées du personnage que nous suivons à ce moment précis.
Le choix du format
Pour la scénarisation proprement dite, je commence par décider du format dans lequel l’histoire sera publiée, que ce soit sous forme de film 3D, de nouvelle visuelle, de nouvelle interactive (plus simple que la nouvelle visuelle), ou autre. Dans le cas des deux derniers formats, il est nécessaire de déterminer le degré d’interactivité, les choix narratifs, les dialogues avec leurs répercussions, et bien d’autres aspects.
Le découpage des scènes
Ensuite, je procède à une lecture intégrale de l’histoire pour la bien assimiler, puis je la découpe en scènes. Pour chaque scène, j’identifie les personnages, les actions et les dialogues existants, ainsi que les éléments à modifier pour que les descriptions, etc., soient adaptées au média choisi.
Je fais usage d’un logiciel d’aide à la création de scénarios, qui me permet de catégoriser aisément les différents éléments de chaque scène, tels que les didascalies, les lieux, les personnages, les actions, les dialogues, les pensées des personnages, etc.
Cette méthodologie facilite grandement l’organisation. J’utilise les didascalies de la manière dont elles sont employées au théâtre, en préparation pour la création ultérieure des storyboards et la mise en scène de chaque scène.
J’ai suivi la même approche lorsque j’ai commencé à créer une bande dessinée basée sur l’une de mes histoires. Je suis convaincue que ce système, quelle que soit la forme choisie, permet un gain de temps considérable lors de la réalisation des storyboards et dans la phase finale de production. C’est d’autant plus crucial lorsque l’on travaille en équipe, car chaque membre peut se référer au scénario.
La transformation de croquis en images 3D
Pour ce qui est des storyboards de chaque scène, les premières versions sont souvent des croquis rudimentaires et les décors sont esquissés de manière basique. Ensuite, je procède à la création de modèles 3D (ou 2D, selon la situation, que je connaisse déjà mes besoins ou que je doive effectuer des recherches pour peaufiner mes idées). Lorsque le premier modèle 3D est validé, je remplace les images dans les storyboards.
Une fois que toutes les scènes sont réellement validées, je revisite les modélisations 3D pour améliorer les objets, les environnements, les couleurs, les textures, etc. Je suis une démarche similaire pour ajuster les animations, chaque étape étant soigneusement planifiée dans les storyboards.
Les ajustements et l’ajout des effets spéciaux
Après le premier rendu sans textures, si des problèmes sont identifiés, des ajustements sont effectués. Les rendus texturés ne sont réalisés qu’une fois que l’animation est validée. Ensuite, vient la phase d’amélioration des textures et l’ajout d’effets spéciaux. Si des dialogues sont ajoutés, cela déclenche la phase d’animation des visages et éventuellement des mains.
À titre d’exemple, il m’a fallu près d’un an pour scénariser le film (étant donné que je travaille sur d’autres aspects en parallèle, cela prend un peu plus de temps). Le processus a été similaire pour la nouvelle visuelle « Double meurtre« , presque autant de temps a été nécessaire. En ce qui concerne la réalisation du film, cela a pris un an, tandis que la nouvelle visuelle a requis quatre mois pour être finalisée.